CINQ AGENTS
BLESSÉS PAR UN JET DE VAPEUR À SAINT-LAURENT B1
Le 20 juillet 2000, cinq agents du CNPE de Saint-Laurent-des-Eaux ont été victimes
d'un jet de vapeur d'eau lors d'un essai du turbo-alternateur de secours LLS en tranche 1.
La tranche était en cours d'essais de redémarrage après arrêt pour entretien annuel et
rechargement en combustible.
Une douzaine d'agents étaient présents dans le local LLS au moment de l'accident. Le
plan d'urgence interne de niveau 1 a été déclenché. Deux agents présentant des
brûlures sévères ont été transportés par hélicoptère à l'hôpital militaire Percy
à Clamart (Hauts-de-Seine). L'un, qui a subi une greffe sur le dos des deux mains, doit
poursuivre sa convalescence dans un centre de rééducation spécialisée. Le second, qui
présentait une atteinte pulmonaire, a pu regagner son domicile le 11 août et ne devrait
avoir aucune séquelle respiratoire.
Deux brûlés au premier degré ont été transportés en ambulance à l'hôpital de
Blois. L'un a pu rentrer chez lui dans la soirée. Le second a quitté l'hôpital le 4
août. Un cinquième agent, victime de simples ecchymoses, a été soigné par le service
médical du site.
Le turbo-alternateur LLS sert à alimenter en électricité les matériels nécessaires
à la sûreté de l'installation, en cas de défaillance des deux lignes d'alimentation
électriques externes du site et des deux groupes électrogènes à moteur diesel propres
à la tranche. Sa turbine est actionnée par la vapeur du circuit secondaire.
L'accident est dû à la rupture brutale du joint de la bride amont de l'alimentation
en vapeur de la turbine. Dans le cadre de la restriction de l'utilisation des joints à
base d'amiante, le joint en place depuis 1993, qui contenait de l'amiante, a été
remplacé en 1999 par un joint sans amiante.
Dans la mesure où la défaillance du joint aurait aggravé un accident qui se serait
produit pendant une perte des alimentations électriques, le CNPE a fait une déclaration
d'incident significatif pour la sûreté. Considérant que le retour d'expérience d'une
défaillance similaire survenue précédemment sur un autre site n'avait pas été
suffisamment pris en compte, l'Autorité de sûreté a décidé de classer cet incident au
niveau 1 de l'échelle INES.
Dans un premier temps, un état des lieux des raccordements de l'alimentation en vapeur
des turbines LLS a été effectué sur l'ensemble du Parc. A l'exception du joint
défaillant à St-Laurent B1, qui a été remplacé, aucun joint du même type n'a été
mis en évidence.
Plus globalement, la direction du Parc a demandé à tous les CNPE d'identifier, dans
les meilleurs délais, les assemblages susceptibles de présenter une défaillance de leur
joint analogue à celle qui est survenue à St-Laurent, et de les remettre en conformité
ou à défaut de mettre en place les mesures de sécurité appropriées.
RUPTURES DU COLLIER DE CERCLAGE DU COUVERCLE DE FÛTS
MÉTALLIQUES DE DÉCHETS RADIOACTIFS
En juillet 2000, en moins de deux semaines, les CNPE de Fessenheim, Blayais et
Tricastin ont successivement été conduits à déclarer en IST (Incident Significatif sur
la sûreté des Transports) une rupture de collier de cerclage d'un couvercle de fût
métallique de déchets radioactifs. Les ruptures de collier ont été constatées lors du
déchargement des fûts à leur arrivée au Centre de Stockage de l'Aube géré par
l'ANDRA. Les fûts, dont les couvercles étaient par ailleurs sertis, sont toujours
restés intègres. Sans collier de serrage, la tenue du sertissage du couvercle n'est pas
garantie. Cependant, le transport des fûts dans un conteneur assure une barrière de
confinement supplémentaire.
Le descriptif de procédé qui sert de référence demande que les cercles soient
serrés manuellement, sans donner de couple à appliquer. Un serrage trop important a pu
fragiliser les soudures du système d'attache.
La rupture du cerclage constitue une non-conformité ADR (Accord européen sur le
transport international des marchandises Dangereuses par Route), dans la mesure où le
cerclage est nécessaire au respect du classement IP-2 (Industrial Package Type 2) du
colis.
A réception des courriers de l'ANDRA les informant des écarts constatés, les CNPE
ont choisi de déclarer ces écarts en EIT (Evénement Intéressant la sûreté des
Transports), en tant que "non-respects des exigences réglementaires prévues par les
certificats d'agrément des modèles de colis". Ces écarts ont été reclassés en
IST à la demande de l'échelon national de l'Autorité de sûreté, qui estime qu'il
s'agit de "non-respect de la réglementation du transport de matières radioactives
qui ont, ou auraient pu avoir, des conséquences significatives".
Compte tenu du caractère potentiellement générique de l'écart constaté, il a été
demandé au CLI, qui est en charge de l'approvisionnement des fûts, de formaliser un mode
opératoire détaillé de mise en place du cerclage. Dans cette attente, il est conseillé
aux CNPE de s'assurer de la conformité des cerclages avant expédition.
ANOMALIE DE CONCEPTION DE RÉSERVOIRS D'EAU
Une anomalie de conception a été mise en évidence, à Bugey et Fessenheim, sur des
réservoirs d'eau PTR et ASG. Cette anomalie a été déclarée au niveau 1 de l'échelle
INES par chacun des deux sites nucléaires concernés.
Le circuit PTR permet de remplir la piscine du réacteur lors des arrêts pour
rechargement et d'alimenter en eau les circuits d'injection de sécurité (RIS) et
d'aspersion dans l'enceinte (EAS). Le circuit ASG permet l'alimentation en eau des
générateurs de vapeur en cas d'indisponibilité de l'alimentation normale.
L'anomalie concerne une prise en compte insuffisante de la tenue au séisme : un point
faible a été localisé au niveau de l'anneau de liaison entre le réservoir et son
ancrage au sol. Cette insuffisance a été détectée lors de l'examen de conformité
mené à Bugey à l'occasion des deuxièmes visites décennales.
Pour les réservoirs PTR de Bugey, la solution de consolidation retenue consiste à
ancrer ces réservoirs grâce à une structure d'un mètre de hauteur, soudée sur la
paroi du réservoir et fixée au sol par des tiges métalliques scellées dans du béton.
Les travaux sont engagés sur trois des quatre tranches du site et programmés, pour la
quatrième, lors de sa visite décennale qui débute en septembre. L'ensemble de ce
chantier, qui demande quatre-vingt jours de travail par réservoir, sera terminé pour fin
2000.
Pour les réservoirs PTR de Fessenheim, une solution de réparation est en cours
d'élaboration. L'Autorité de sûreté a fait part de son souhait de disposer de la note
de dirnensionnement de ces réparations trois semaines avant l'engagement des travaux.
Pour les réservoirs ASG, la situation est la suivante. A Bugey 2, où un problème
ponctuel avait été noté, les travaux sont terminés. Pour Fessenheim 1, les travaux
sont engagés depuis la mi-août. Pour Fessenheim 2, à l'arrêt pour visite décennale,
l'objectif est d'avoir terminé les travaux avant la fin de cet arrêt.
A titre conservatoire, des dispositions d'exploitation garantissant la sûreté ont
été mises en place dans l'hypothèse d'un séisme rendant impossible l'utilisation de
l'un ou l'autre des réservoirs concernés.
En prolongement, dans le cadre du réexamen décennal de sûreté en cours, un
programme d'examen complémentaire relatif à la résistance au séisme sera engagé à
Bugey et Fessenheim.
DÉFAUTS DANS DES SOUDURES DE BOSSAGES DE PIQUAGES À
DAMPIERRE
En juillet 2000, dans le cadre du traitement du dossier "piquages sensibles",
le CNPE de Dampierre a été confronté à deux reprises au même type de problème sur
deux tranches différentes.
Sur ces deux tranches, des piquages ont été supprimés : l'allonge, qui constitue le
piquage proprement dit, a été déposée et un bouchon soudé a été mis en place. A
chaque fois, la radiographie de contrôle réalisée a mis en évidence des défauts dans
la soudure qui assemble le bossage, sur lequel est implantée l'allonge du piquage, à la
tuyauterie elle-même. Ces défauts sont de type collage et inclusion.
Aucun contrôle volumique des soudures de bossage n'est demandé en exploitation, car
aucun défaut traversant n'y a jamais été observé. Par contre, après dépose d'un
piquage, la soudure du bouchon sur le bossage fait l'objet d'un contrôle radiographique.
En raison de la proximité de la soudure à contrôler et de celle du bossage sur la
tuyauterie, la soudure du bossage peut-être visible sur le film radiographique. Ce fut le
cas à Dampierre pour cinq piquages ASG en tranche 3 et un piquage RRA en tranche 2.
Les experts consultés s'accordent à penser que les défauts observés sont très
certainement des défauts d'origine qui n'évoluent pas, et qui n'ont donc pas de
nocivité pour les circuits concernés. Reste à faire la preuve de cette absence de
nocivité, ce qui n'est pas très simple, car il n'existe pas de modèle de calcul
éprouvé pour ce type de raccord, où le diamètre du bossage est important par rapport
au diamètre de la tuyauterie. De plus, en raison d'une accessibilité limitée, il est
difficile de caractériser avec précision les défauts, ce qui complique la justification
par le calcul.
Dans le cas des deux tranches de Dampierre, les défauts ayant été découverts en fin
de visite annuelle, il a été décidé de privilégier un redémarrage rapide des
tranches. Les tronçons de tuyauteries ASG concernés ont été remplacés par des
tronçons sans bossage. Le bossage RRA a été laissé en l'état pour le cycle à venir,
moyennant le rajout d'un étrier de renfort.
II n'est cependant pas question de généraliser à tout le Parc, la décision prise à
titre conservatoire pour Dampierre, dont la non-nocivité des défauts ne pouvait être
justifiée dans les délais. C'est pourquoi tout ou partie des tronçons de tuyauteries
déposés seront expertisés afin de prouver que les défauts sont bien d'origine et n'ont
aucunement évolué depuis. De plus, leur dépose permettra de caractériser les défauts
avec précision, et de réaliser un calcul plus réaliste permettant d'en justifier
l'absence de nocivité.
II a été précisé à l'Autorité de sûreté que les dispositions prises pour
redémarrer les deux tranches de Dampierre relevaient d'un choix industriel, qui ne
préjuge en rien du résultat des calculs de justification. L'objectif est bien
évidemment d'éviter d'avoir à contrôler, et à fortiori remplacer, les bossages sur
tous les piquages du Parc.
EXPOSITION D'UN AGENT DU CNPE DE GRAVELINES HORS ZONE NUCLÉAIRE
Le 27 juillet 2000, un agent du CNPE de Gravelines a été détecté contaminé en
sortie de site, en vêtements civils, au passage du portique C3. Ce type de portique a
été installé récemment en sortie de site, dans le cadre du plan "propreté
radiologique".
Après une première analyse, il s'est avéré que cet agent avait réalisé une
expertise, hors zone nucléaire, sur un emballage en béton utilisé pour le transport de
déchets radioactifs. Cet emballage, qui était neuf, vide et réputé non radioactif, et
était stocké avec les autres emballages neufs, avait en fait séjourné en zone
nucléaire.
L'agent s'étant contaminé hors zone nucléaire, sa contamination n'a pu être
détectée que juste avant la sortie du site. Les mesures effectuées sur sa tenue de
travail, restée à l'intérieur du site, indiquent un niveau de contamination de l'ordre
de 150 000 becquerels. L'agent présentait quelques traces de contamination corporelle,
qui ont été éliminées par une simple douche, mais aucune contamination interne.
Des points de contamination ont été relevés au sol aux abords immédiat de
l'emballage incriminé. Les actions de décontaminations adaptées ont été mises en
uvre sur la zone de stockage de l'emballage, ainsi que sur le trajet de l'agent à
l'intérieur du site.
MISE EN PLACE D'UN SYSTÈME FORMALISÉ DE DÉCISIONS DE
L'AUTORITÉ DE SÛRETÉ ET DE MISES EN DEMEURE
Afin de clarifier les échanges avec les exploitants de toutes les installations
nucléaires de base, et d'améliorer la lisibilité de son action vis-à-vis du public,
(Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN) a décidé de mettre en place un système de
" décisions de l'Autorité de sûreté " et de " mises en demeure ".
Ces décisions et mises en demeure ont vocation à être rendues publiques, notamment
sur le site Internet de l'ANS ainsi que par une information de la Commission locale
d'information si un site particulier est concerné. L'ASN précise qu'elles devront
cependant avoir été préalablement reçues par leur destinataire avant d'être rendues
publiques.
Décisions de l'Autorité de sûreté
Outre l'approbation de documents et les procédures d'autorisations, la forme de
décision sera utilisée pour les prises de position importantes de l'ASN clôturant une
affaire ou une étape majeure de son instruction.
Une décision est, clairement identifiée par le vocable « décision ». En
particulier, une simple « demande n n'est pas une décision. Une modification de
décision fait l'objet du même formalisme que la décision elle-même.
Toute affaire n'a pas nécessairement vocation à être conclue par une décision. Dans
la mesure où il existe un engagement clair de (exploitant, lASN estime qu'il sera
suffisant, le plus souvent, d'en prendre acte.
Lorsqu'une décision fixe des exigences à l'égard d'un exploitant, celui-ci doit
avoir été mis en mesure de présenter préalablement ses observations. Les projets de
décision seront donc transmis à l'exploitant avec un préavis suffisant pour lui
permettre de faire valoir son point de vue.
L'ASN souhaite que des échanges approfondis aient pu avoir lieu entre EDF et l'ASN sur
le contenu technique, les délais et l'impact sur la sûreté, mais aussi, le cas
échéant, sur les conséquences industrielles et économiques, sans pour autant qu'un
accord soit un préalable nécessaire à la signature d'une décision.
Enfin, l'ASN considère qu'une décision notifiée est prescriptive et n'est plus
discutable. L'ANS considère, en particulier, que les décisions concernant les CNPE,
adressées aux services centraux d'EDF ou directement aux CNPE, sont directement
applicables sur les sites, qu'elles soient retranscrites ou non par EDF sous forme de
directive ou de prescription interne.
Une modification de décision fait l'objet du même formalisme
mises en demeure
Une mise en demeure peut être prise à l'encontre d'un exploitant qui ne respecte pas
- un texte réglementaire général,
- une autorisation administrative propre à une installation,
- un texte établi par l'exploitant et soumis à l'ASN,
- un engagement pris par l'exploitant auprès de l'ANS et dont celle-ci a accusé
réception,
- une demande spécifique de l'ANS à caractère prescriptif et définitif, telle
qu'une e décision ».
L'objet de la mise en demeure est d'enjoindre solennellement l'exploitant de se
remettre en conformité, tout en lui accordant un ultime délai. La mise en demeure
explicite clairement la non-conformité qui la motive. Son champ doit être restreint à
une obligation bien identifiée, ou éventuellement un nombre limité d'entre elles.
Une mise en demeure n'est envisageable que dans la mesure où l'obligation faite à
l'exploitant préexiste de manière claire. Une demande informelle à un exploitant ou un
engagement flou et sans échéancier de sa part ne peut suffire. L'ASN précise que, le
cas échéant, il convient d'abord d'obtenir de l'exploitant un engagement effectif y
compris en termes de délais ou, à défaut, de fixer une telle date par une décision de
l'Autorité de sûreté.
Toute mise en demeure est assortie d'un délai contraignant. Afin que ce délai puisse
être respecté, l'ASN considère comme bonne pratique de mettre l'exploitant en mesure de
présenter ses observations, tant en ce qui concerne la réalité de la non-conformité
observée que le réalisme du délai de mise en conformité imposé.
La mise en demeure fait état de la sanction encourue si la non-conformité persiste
une fois ce délai écoulé. L'ANS rend publique la nature des suites données par
l'exploitant. Si les délais prescrits ne sont pas respectés, l'ANS prend des sanctions
appropriées : procès verbal de contravention, refus d'autoriser le redémarrage d'un
réacteur, suspension ou restriction du fonctionnement de l'installation,...
Ce nouveau système, clarification des décisions et mise en demeure en cas de
non-tenue des engagements, est une opportunité pour EDF de mieux expliciter et négocier
les engagements pris, en optimisant et priorisant les actions d'amélioration de la
sûreté. C'est tout le sens du projet "inscrire la sûreté dans une logique
industrielle".