Evaluation
des conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl en France dispositif de
surveillance épidémiologique état des connaissances, évaluation des risques et
perspectives |
INSTITUT DE PROTECTION ET DE SURETE NUCLÉAIRE
INSTITUT NATIONAL DE VEILLE
SANITAIRE |
Décembre 2000 |
RAPPORT IPSN-InVS Réf.IPSN/00-15b
Conclusions de l'étude
En réponse à la demande de la Direction générale de la santé,
l'étude conjointe IPSN-InVS apporte une appréciation qualitative et quantitative sur les
conséquences sanitaires de l'accident de Tchernobyl en France, au travers du calcul des
risques de cancers de la thyroïde potentiellement induits pour les enfants qui
résidaient dans l'Est de la France en 1986. Les principales conclusions sont les
suivantes:
- Les doses moyennes à la thyroïde estimées pour les enfants de moins de 15 ans qui
résidaient dans l'Est de la France sont faibles, de l'ordre de 100 fois moins que celles
reçues par les enfants de Biélorusse parmi lesquels une épidémie de cancers
thyroïdiens a été décelée. Dans ces conditions, l'existence d'un risque réel est
incertaine car on ne dispose pas d'observation épidémiologique mettant en évidence un
excès de cancers de la thyroïde à ces niveaux de dose et dans des conditions
d'exposition équivalentes. Il se peut donc que le risque soit nul, mais, par prudence, on
ne peut cependant pas exclure la possibilité d'un tel excès, en particulier chez les
enfants.
- En supposant une relation dose-effet linéaire sans seuil entre les doses à la
thyroïde et les excès de risque de cancer de la thyroïde aux faibles doses hypothèse
couramment admise dans les études de gestion des risques, le calcul théorique du nombre
potentiel de cancers de la thyroïde en excès pour les enfants qui résidaient dans l'Est
de la France en 1986 conduit aux résultats suivants, selon le modèle chois : sur la
période 1991-2000, entre 0,5 et 22 cancers en excès pour 97 cas spontanés attendus,
c'est-à-dire entre 0,002 et 0,1 cas pour 100 000 habitants et par an ; sur la période
1991-2015, entre 6,8 et 54,9 cancers en excès pour 899 cas spontanés attendus pour ces
25 années.
- Ces résultats comportent des incertitudes ; néanmoins, ils fournissent un ordre
de grandeur de l'excès de cancers de la thyroïde qui pourrait être. observé dans la
population étudiée. II est aussi possible que l'excès de risque réel de cancer de la
thyroïde aux niveaux de dose considérés soit nul, l'hypothèse de la relation
dose-effet linéaire sans seuil n'étant pas démontrée au plan scientifique.
- Sur un plan épidémiologique, ces valeurs d'excès de risque sont faibles de sorte que
leur mise en évidence directement par des études épidémiologiques parait incertaine
pour des raisons de puissance statistique, et de données insuffisantes sur l'exposition
individuelles des personnes aux retombées d'iode radioactif de l'accident de Tchernobyl.
L'accent devrait être mis sur l'amélioration de l'enregistrement
des cancers de la thyroïde en France. En effet, ce cancer mérite un suivi particulier du
fait de l'augmentation de sa fréquence en France. Un système de surveillance de ce
cancer renforcé et élargi, constituerait un outil utile pour expliquer les raisons de
cette augmentation et pour faciliter la réalisation d'études épidémiologiques sur les
facteurs de risque de ce cancer.
Enfin, ces estimations d'excès de risque ne permettent pas
d'expliquer l'augmentation de la fréquence des cancers de la thyroïde dans la population
générale, constatée en France depuis 20 ans. Des études en cours, coordonnées par
l'InVS, vont permettre de juger de l'évolution des pratiques de prise en charge et de
l'amélioration des techniques de diagnostic. En fonction de leurs résultats, il pourra
être opportun de recommander une étude portant sur les facteurs de risque de ce cancer
en France.
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